Sommes-nous des snobes dans le SEO francophone ? – Light Agency

Deux professionnels du web, un homme et une femme, travaillent chacun sur un ordinateur portable dans un décor aux tons bleu et rose, inspiré d’une charte graphique moderne. Entre eux, une bulle représentant une annonce de recrutement en anglais crée un contraste visuel, illustrant le décalage entre langue utilisée et cible visée dans le domaine du SEO francophone.

Ce billet, je l’écris sous le coup d’une colère froide, née d’un constat sans appel au fil de mes recherches de nouveaux partenariats. Encore et encore, je tombe sur des annonces de recrutement en anglais… pour des postes de rédacteurs web ou SEO en français.

Sur LinkedIn, dans les groupes spécialisés, la tendance persiste : des agences francophones publient en anglais pour s’adresser à des professionnels de la langue française. Des missions centrées sur la qualité rédactionnelle en français, mais communiquées dans une langue qui n’a rien à faire là.

Une simple habitude du secteur ? Une volonté de « faire professionnel » ? Ou un signal révélateur d’un complexe bien ancré dans notre façon de communiquer dans le monde du digital ?

Recruter des rédacteurs français… en anglais ? Sérieusement ?

Que vous parcouriez les annonces LinkedIn, les plateformes de freelances ou les groupes spécialisés, un étrange paradoxe s’impose : des recruteurs francophones publient leurs offres en anglais… pour des missions dans lesquelles la maîtrise du français est pourtant le critère n°1. Postes de rédacteur webSEO on-pagecréateur de contenus pour un public francophone… et l’annonce démarre par un « Looking for a skilled French copywriter… ». Ironique, non ? La mission est 100 % en français. Le client est français. Le public est français. On communique cependant… en anglais. Comme si l’anglais était le passage obligé pour se donner de la crédibilité ou élargir artificiellement le vivier de profils. En réalité, cette habitude en dit long sur une certaine perception du marché :

  • l’anglais serait plus « pro », plus « universel » ;
  • le français ne suffirait plus à asseoir une posture d’expertise ;
  • ou pire : les meilleurs talents francophones se trouvent forcément à l’étranger, donc il faudrait leur parler dans la langue du business global.

C’est faux. C’est surtout, à mon humble avis, contre-productif. En publiant une offre en anglais, les recruteurs éliminent de fait de nombreux profils francophones compétents, ne se sentant pas concernés ou comprenant à demi-mot qu’il est recherché un certain « profil international » au détriment du bon sens linguistiqueRésultat ? Des annonces floues, des missions mal ciblées et un vrai risque de passer à côté des profils réellement qualifiés… pour de mauvaises raisons.

Faut-il renier sa langue pour travailler dans le SEO ?

C’est la question que tout rédacteur SEO francophone devrait se poser. En parcourant certaines offres, en tant que professionnel de la rédaction en langue française, nous avons légitimement le droit de nous demander si, franchement, parler (et aimer) sa langue ne devient pas un handicap.
L’anglais s’impose partout : dans les outils, dans les termes techniques, dans les intitulés de postes, dans les échanges… et maintenant dans les offres d’emploi ciblant des francophones.

Ce glissement n’est pas anodin. Il crée une pression implicite : pour être reconnu, il faudrait parler SEO en anglaistraduire son expertiseprouver sa légitimité dans une langue autre que celle dans laquelle nous produisons. Le paradoxe est cruel : les clients et nos partenaires nous demandent une excellence rédactionnelle en français, mais ils ne daignent même plus communiquer dans cette langue au moment de recruter.

Faut-il vraiment jouer ce jeu ? Faut-il renier sa langue pour « coller » aux standards du marché ? Je n’en suis pas intimement persuadée. Je crois même qu’il est temps de le dire.

Publier en anglais : est-ce pour discriminer en silence ?

Dans bien des cas, publier une annonce en anglais n’a rien d’innocent. Ce choix, volontaire ou pas, agit comme un filtre silencieux. Il exclut, sans l’admettre, une partie des professionnels francophones ne se sentant pas légitimes dans un contexte 100 % anglophone. Certains ne postuleront pas par peur de ne pas « faire assez international ». D’autres considéreront, à raison, que la langue de travail étant le français, une annonce rédigée en anglais est un signal de déconnexion.

C’est bien de cela qu’il s’agit : un biais élitiste qui ne dit pas son nom. Une manière de valoriser l’aisance linguistique ou le passage par des formations internationales… plutôt que la compétence rédactionnelle réelle en français. Ce glissement crée une hiérarchie implicite : parler anglais devient un critère implicite de « sérieux », de « professionnalisme » ou de « standing ». Mais à quel prix ? :

  • les recruteurs ou les agences de communication écartent des profils compétents simplement parce qu’ils ne jouent pas la carte de l’anglais à tout-va ;
  • la fracture entre les professionnels issus de grandes métropoles, parfois bilingues, et ceux venus d’autres horizons, pourtant tout aussi talentueux, se creuse ;
  • l’anglais donne l’illusion d’ouverture, mais exclut en réalité une partie des professionnels francophones pourtant parfaitement qualifiés.

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : personne ne conteste l’utilité de l’anglais dans le monde du digital. En faire toutefois une barrière d’accès à des missions en français, c’est non seulement incohérent, mais surtout injuste.

Et si on faisait juste preuve de cohérence ?

Soyons bien en phase ! Il ne s’agit pas de rejeter l’anglais, il s’agit de remettre chaque langue à sa place. Quand une mission est 100 % en français, que le public est francophone, que l’objectif est de produire un contenu éditorial exigeant dans notre langue, alors pourquoi recruter en anglais ?
La cohérence, c’est aussi du respect : pour la langue de travail, pour les professionnels concernés, pour les lecteurs finaux. Ce n’est ni ringard ni frileux que de défendre le français quand il est au cœur de la mission. C’est simplement logique. Alors, à ceux qui recrutent, je pose cette question : si la prochaine fois, vous faisiez simple ? Une annonce claireen français, pour un travail… en français.

Dans un monde digital saturé de codes, d’anglicismes et de postures, choisir la clarté linguistique est peut-être l’un des derniers vrais actes de style. Ce n’est pas faire simple par défaut, c’est faire juste par intention. Écrire une annonce en français quand on cherche un professionnel du français, ce n’est pas « petit joueur » : c’est précisassuméprofessionnel.
Et si, demain, vous mesuriez l’exigence non à la langue utilisée… mais à la manière dont elle sert réellement la mission ? Voilà une élégance dont le SEO francophone ne devrait pas se priver.

Je sais que je ne suis pas la seule à tiquer en lisant ces annoncesVous, vous en pensez quoi ? Vous postulez quand c’est en anglais ou vous passez votre chemin ?

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